Le Conseil d’Etat juge que la cristallisation des règles d’urbanisme issue d’un certificat d’urbanisme est un droit pour son bénéficiaire. Ce droit ne s’oppose pas à l’application des règles d’urbanisme normalement en vigueur au bénéfice du pétitionnaire (CE, 6 juin 2025, Commune des Lilas, n°491748).
Le certificat d’urbanisme permet de bénéficier d’une cristallisation des dispositions d'urbanisme, du régime des taxes et de participations d'urbanisme ainsi que des limitations administratives au droit de propriété pendant un délai de 18 mois (article L.410-1 du code de l’urbanisme).
Les règles d’urbanisme opposables à toute demande déposée dans ce délai de 18 mois sont donc en principe celles en vigueur à la date de délivrance du certificat d’urbanisme.
Ce qui permet au demandeur de se prémunir d’une éventuelle évolution défavorable des règles d’urbanisme.
Seules font exception les règles relatives à la préservation de la sécurité et de la salubrité publiques.
Le certificat d’urbanisme ne fait toutefois pas obstacle à la possibilité d’opposer un sursis à statuer si les conditions le permettant sont réunies à la date de délivrance du certificat (CE, 3 avril 2014, Commune de Langolen, n°362735 ; CE, 18 décembre 2017, n°380438).
Dans sa décision du 6 juin 2025 (n°491748), le Conseil d’Etat précise la portée de ce mécanisme de cristallisation.
La cristallisation des règles d’urbanisme issue d’un certificat d’urbanisme est un droit pour le pétitionnaire.
Ce droit n’a toutefois pas pour effet de priver son bénéficiaire de voir sa demande examinée au regard des règles d’urbanisme normalement en vigueur, sans tenir compte du certificat d’urbanisme.
Encore plus, le demandeur peut même bénéficier de l’application des règles d’urbanisme normalement en vigueur et de l’application de certaines règles d’urbanisme cristallisées. A l'exception des règles relatives à la sécurité et à la salubrité publiques et à condition qu'il s'agisse de règles divisibles :
“ (...) 3. Les dispositions de l’article L. 410-1 du code de l’urbanisme ont pour effet de garantir à la personne à laquelle a été délivré un certificat d’urbanisme, quel que soit son contenu, un droit à voir sa demande de permis de construire, déposée durant les dix-huit mois qui suivent, examinée au regard des dispositions d’urbanisme applicables à la date de ce certificat, à la seule exception de celles qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique. Elles n’ont en revanche ni pour objet ni pour effet de la priver de son droit d’obtenir un permis de construire lorsque son projet est conforme aux règles d’urbanisme applicables à la date de la décision prise sur sa demande ou, si le projet n’est pas conforme à celles de ces règles qui n’ont pas pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique ou à une partie divisible d’entre elles, lorsqu’il l’est aux règles de même objet applicables à la date du certificat d’urbanisme.(...) ” (CE, 6 juin 2025, Commune des Lilas, commune des Lilas, n°491748).
Cette solution est particulièrement favorable aux bénéficiaires de certificats d’urbanisme.
Le certificat d’urbanisme joue pleinement son rôle.
Il préserve le droit de son bénéficiaire contre une éventuelle évolution défavorable des règles d’urbanisme.
Mais il ne le prive pas de la possibilité de voir sa demande examinée au regard des règles normalement en vigueur. En particulier si les règles d’urbanisme ont évolué plus favorablement pour son projet. Le demandeur peut alors choisir d’écarter les effets de son certificat d’urbanisme au profit de l’application des règles d’urbanisme normalement en vigueur.
Le demandeur peut même choisir de panacher les règles d’urbanisme applicables à son projet en fonction de leur caractère plus ou moins favorable. A condition cependant qu’il ne s’agisse pas de règles relatives à la sécurité et à la salubrité publique et qu’elles présentent un caractère divisible.
Les bénéficiaires d’un certificat d’urbanisme disposent ainsi d’une sorte de droit d’option entre l’application des règles cristallisées et/ou des règles normalement applicables, selon qu’elles sont plus ou moins favorables à son projet.
Cette jurisprudence est intéressante sur le plan strictement juridique. Elle est de plus particulièrement favorable aux porteurs de projets.
Sur le plan pratique, elle soulève toutefois de nombreuses interrogations.
Comment ce droit d’option doit-il s’exercer ?
Faut-il que le demandeur sollicite l’application des règles normalement en vigueur ? A défaut, seules les règles cristallisées sont-elles applicables ?
Si oui, quelle forme cette demande doit-elle prendre ? Y a-t-il seulement une forme particulière ? Faut-il la faire apparaître expressément dans la demande de l’autorisation d’urbanisme ? A partir de quel moment le service instructeur est-il saisi d’une telle demande ?
Ou bien l’application des règles plus favorables est-elle de droit ?
Autrement dit, le service instructeur peut-il, voire doit-il appliquer les règles d’urbanisme normalement en vigueur si le projet est conforme à ces règles et pas aux règles cristallisées ?
Les mêmes questions se posent s’agissant du panachage des règles d’urbanisme.
Ce panachage peut-il d’ailleurs jouer dans les deux sens ? A savoir l’application des règles cristallisées à l’exception de certaines normalement en vigueur et/ou l’application des règles normalement en vigueur à l’exception de certaines cristallisées ?
Autant de questions qui restent à trancher à ce stade.
Le bénéficiaire d’un certificat d’urbanisme bénéficie d’une vraie liberté sur l’application des règles d’urbanisme.
Nous recommandons donc plus que jamais aux porteurs de projets de solliciter systématiquement un certificat d’urbanisme.
De nombreuses questions se posent toutefois en pratique, notamment pour les services instructeurs qui seront confrontés à des demandes non conformes aux règles cristallisées mais conformes aux règles normalement en vigueur.
Cette jurisprudence sera certainement à l’origine de contentieux à venir qui permettront d’en préciser les conditions d’application.