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Renversement de la présomption d’urgence à suspendre une décision de mise en demeure de démolir une construction en référé-suspension - CE, 20 mai 2025, n° 500476

27
/
05
/
2025
par
Hélène Saunois
Chapitres

Reconnaissance de la présomption d’urgence en cas de mise en demeure prescrivant la démolition de constructions irrégulières

Dans une décision du 11 décembre 2023 (req. n°470207), le Conseil d’État jugeait au sujet de la démolition que, lorsque la mise en demeure prescrit une mise en conformité impliquant nécessairement la démolition de constructions, la condition d’urgence est présumée satisfaite en cas de référé suspension introduit par le propriétaire :

“ (…) 3. Eu égard à la gravité des conséquences qu’emporte une mise en demeure, prononcée en application de l’article L. 481-1 du code de l’urbanisme, lorsqu’elle prescrit une mise en conformité qui implique nécessairement la démolition de constructions, la condition d’urgence est en principe satisfaite en cas de demande de suspension de son exécution présentée, sur le fondement des dispositions de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, par le propriétaire de l’immeuble qui en est l’objet. Il ne peut en aller autrement que dans le cas où l’autorité administrative justifie de circonstances particulières faisant apparaître, soit que l’exécution de la mesure de démolition n’affecterait pas gravement la situation du propriétaire, soit qu’un intérêt public s’attache à l’exécution rapide de cette mesure. (…) ” (CE, 11 décembre 2023, SCI Brunetière, n°470207, Lebon T).

Cette présomption peut toutefois être renversée si l’administration justifie de circonstances particulières et démontre :

- soit que l’exécution de la mesure de démolition n’affecterait pas gravement la situation du propriétaire ;

- soit qu’un intérêt public s’attache à l’exécution rapide de cette mesure.

Le Conseil d’État avait finalement jugé qu’aucun des moyens soulevés par la requérante n’était propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité des deux décisions de mises en demeure et avait donc rejeté sa demande de suspension.

Renversement de la présomption d’urgence en raison de l’existence d’un intérêt public à exécuter rapidement la décision

En l’espèce, par un arrêté de mise en demeure, le maire d’une commune a enjoint les propriétaires, d’effectuer les opérations nécessaires au respect de la réglementation d’urbanisme et de l’environnement pour des parcelles dont ils sont propriétaires, « consistant en une remise en état complète du terrain jusqu’à son niveau naturel avant travaux et la démolition de trois constructions annexes, dans un délai de quinze jours ».

Par un nouvel arrêté, le maire de la commune a, sur le fondement de l’article L.481-1 du code de l’urbanisme, prononcé à leur encontre une astreinte d’un montant journalier de 300 euros jusqu’à la satisfaction de la mise en demeure dont ils avaient été destinataires.

Les propriétaires ont demandé au juge des référés du tribunal administratif la suspension de l’exécution de cet arrêté.

Par une ordonnance de référé, il a été fait droit à leur demande.

La commune s’est alors pourvue en cassation contre l’ordonnance de référé rendue.

Dans la décision commentée, le Conseil d’État commence par rappeler son considérant de principe avant de juger que le juge des référés du tribunal administratif, pour prononcer la suspension de l’arrêté litigieux, « s’est borné à retenir que l’astreinte, eu égard à son montant, était de nature à affecter la situation des propriétaires et qu’aucun intérêt public ne s’attachait à la démolition d’un poulailler. » (CE, 20 mai 2025, n° 500476)

Le Conseil d’État poursuit :

« En statuant ainsi, sans notamment rechercher si, comme le soutenait la commune de Morillon en défense pour renverser la présomption d’urgence, il existait un intérêt public à exécuter rapidement la décision litigieuse dès lors que les trois constructions litigieuses, situées dans une zone exposée à un risque torrentiel fort, étaient, dans les circonstances de l’espèce, de nature à porter atteinte à la sécurité publique, le juge des référés a entaché son ordonnance d’une insuffisance de motivation et d’une erreur de droit. Il s’ensuit que, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, la commune de Morillon est fondée à demander l’annulation de l’ordonnance qu’elle attaque » (CE, 20 mai 2025, n° 500476)

Statuant sur la demande de suspension, le Conseil d’État juge qu’aucun des moyens soulevés par les propriétaires n’est propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de l’arrêté litigieux et a donc rejeté leur demande de suspension.

Conclusion

Si l’urgence à suspendre une décision de mise en demeure de démolir une construction est présumée en référé-suspension, cette nouvelle décision du Conseil d’État démontre qu’il est aisé de renverser cette présomption d’urgence.

En demande comme en défense, il convient d’être particulièrement vigilant quant aux circonstances particulières qui peuvent justifier de renverser la présomption d’urgence.

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