Pour obtenir une autorisation d’urbanisme (permis de construire, permis d’aménager ou déclaration préalable), les travaux doivent être conformes aux règles d’urbanisme, notamment aux règles du Plan Local d’Urbanisme (PLU) en vigueur (article L.152-1 du code de l’urbanisme).
Ce qui n’autorise aucun écart.
Le législateur a cependant prévu des dérogations pour favoriser certains projets et certains objectifs (mixité sociale, renouvellement urbain, lutte contre le changement climatique, zéro artificialisation nette…).
Ces dérogations sont intéressantes puisqu’elles permettent de s’écarter des règles d’urbanisme dans une certaine mesure, voire d’augmenter le potentiel de constructibilité. Elles permettent aussi de réaliser des projets plus qualitatifs.
Les conditions permettant d’en bénéficier sont toutefois assez strictes et bien précises.
Avant d’aborder les principales dérogations, voyons comment bénéficier d’une dérogation.
Les dérogations possibles sont d’abord limitatives et prévues exclusivement par le code de l’urbanisme. Aucune autre dérogation que celles prévues par les articles L.152-4 à L.152-6-4 de ce code ne peut donc être accordée (article L.152-3 du code de l’urbanisme).
Pour en bénéficier, il faut ensuite en formuler une demande explicite auprès de l’administration. La plupart des demandes de dérogation nécessitent d’ailleurs une pièce complémentaire, par exemple une note justifiant que les conditions permettant de bénéficier de la dérogation sont réunies.
Pour l’administration, accorder la dérogation n’est toutefois qu’une simple faculté.
Si la dérogation est accordée, la décision doit être motivée (articles L.211-3 du code des relations entre le public et l’administration et L.424-3 du code de l’urbanisme). A défaut, le permis de construire est illégal (CE, 22 juillet 2020, Société Altarea Cogedim, n°426139). Un permis de construire tacite est donc insuffisant et ne peut permettre de bénéficier d’une dérogation, sauf exception. C’est par exemple de la cas de la dérogation mixité sociale accordée sur le fondement de l’article L.152-6 du code de l’urbanisme.
En cas de refus d’accorder une dérogation, une contestation est possible devant le juge administratif dont le contrôle est cependant limité à l’erreur manifeste d’appréciation.
Il faut enfin distinguer les dérogations des exceptions et des adaptations mineures.
Les exceptions sont prévues par les textes et ne nécessitent pas de demande spécifique ou d’autorisation particulière. Une règle différente est ainsi prévue par exception à la règle générale et le projet peut en bénéficier si les conditions le permettant sont réunies. L’administration n’a donc pas de réel pouvoir d’appréciation si ce n’est sur la vérification de la conformité du projet. Il peut par exemple s’agir d’une règle de hauteur contenue dans un PLU selon laquelle, pour certains projets, la hauteur maximale peut être plus importante.
Les adaptations mineures permettent de s’écarter d’une règle d’urbanisme pour des raisons fortement encadrées. Il faut en effet que cet écart soit rendu “nécessaire par la nature du sol, la configuration des parcelles ou le caractère des constructions avoisinantes”. En pratique, de faibles degrés d’écart sont autorisés, généralement inférieur à 10% (article L.152-3 du code de l’urbanisme).
Conseil : étudier dans un premier temps la possibilité de bénéficier d’une dérogation et vérifier la conformité du projet avec les conditions prévues par le code de l’urbanisme pour en bénéficier. Si cela est envisageable, échanger le plus tôt possible avec l’administration, notamment dans la cadre d’une pré instruction, puisqu’elle dispose d’une marge d’appréciation. Il faut également préciser expressément la demande de dérogation dans la demande de permis de construire.
Ces dérogations sont prévues par les articles L.152-5 et R.152-5 à R.152-9 du code de l’urbanisme.
Elles permettent de déroger aux règles des Plans Locaux d’Urbanisme (PLU) relatives à l’emprise au sol, à la hauteur, à l’implantation et à l’aspect extérieur des constructions à l’occasion d’une déclaration préalable ou d’une demande de permis de construire, de permis d’aménager.
Les dispositifs de dérogation sont les suivants :
La dérogation est exclue pour certains immeubles protégés, à savoir les immeubles classés ou inscrit au titre des monuments historiques, situés dans les abords d’un monument historique, situés dans le périmètre d’un SPR ou protégés par le PLU en application de l’article L.151-19 du code de l’urbanisme.
Dans tous les cas, un contrôle technique et esthétique est effectué par l’administration pour accorder ou non la dérogation demandée. La surépaisseur ou la surélévation doit ainsi :
Attention, la dérogation n’autorise pas le surplomb sur le fonds voisin ou sur le domaine public :
Cette dérogation est prévue par les articles L.152-5-1 et R.152-5-1 du code de l’urbanisme.
Elle permet de déroger aux règles des PLU relatives à la hauteur et à l’aspect extérieur des constructions afin d’autoriser l’installation de dispositifs de végétalisation des façades et des toitures, à l’occasion d’une déclaration préalable ou d’une demande de permis de construire.
Le projet doit être situé dans les zones urbaines et à urbaniser.
Le dispositif permet un dépassement d’un 1 mètre maximum en tout point au-dessus de la hauteur de la construction autorisée par le PLU, sans compter la végétation. Il peut également être dérogé aux règles du PLU relatives aux caractéristiques architecturales des façades et toitures des constructions.
Là encore, le double contrôle technique et esthétique est exercé par l’administration.
Conseil : comme pour les dispositifs d’isolation, le contrôle de l’administration sur l’insertion du projet est à anticiper. Nous recommandons donc d’en discuter le plus tôt possible avec l’administration.
Cette dérogation est prévue par les articles L.152-5-2 et R.152-5-2 du code de l’urbanisme.
La réalisation de constructions faisant preuve d’exemplarité environnementale peut en pratique impliquer une surépaisseur et ainsi entraîner un dépassement des règles de hauteur prévues par le PLU. Cette dérogation permet donc à ces constructions de déroger aux règles des PLU relatives à la hauteur à l’occasion d’une déclaration préalable ou d’un permis de construire.
Pour en bénéficier, la construction doit faire preuve d’exemplarité environnementale. Ce qui suppose de satisfaire aux critères prévus par le code de la construction et de l’habitation à ce sujet. Une attestation de prise en compte des critères d’exemplarité environnementale établie par un organisme accrédité doit d’ailleurs être jointe à la demande d’autorisation.
Le dispositif permet un dépassement de 25 centimètres par niveau et pour un total de 2,5 mètres en tout point au-dessus de la hauteur de la construction autorisée par le règlement du PLU.
Ce dépassement doit être justifié par les contraintes techniques résultant de l’utilisation d’un mode de construction faisant preuve d’exemplarité environnementale qui suppose une hauteur par étage plus importante que celle résultant d’autres modes de construction.
Elle ne permet en revanche pas l’ajout d’un étage supplémentaire.
Pour décider d’accorder ou non la dérogation, l’administration doit enfin tenir « compte de la nature du projet et de la zone d’implantation ».
Conseil : si l’attestation de prise en compte des critères d’exemplarité environnementale est jointe, la qualification de construction faisant preuve d’exemplarité environnementale est a priori acquise puisque l’instruction repose sur un régime déclaratif. Le dépassement autorisé pour le projet en question doit en revanche être justifié par de réelles contraintes techniques détaillées dans la demande.
Plusieurs dérogations sont prévues par l’article L.152-6 du code de l’urbanisme pour les communes situées en zone tendue (en application de l’article 232 du CGI) et celles de plus de 15 000 habitants en forte croissance démographique figurant sur la liste prévue au dernier alinéa du II de l’article L.302-5 du code de la construction et de l’habitation.
L’administration peut ainsi déroger aux règles suivantes, à l’occasion d’une demande de permis de construire, en tenant compte de la nature du projet de la zone d’implantation :
Cette dérogation est prévue par l’article L.152-6-1 du code de l’urbanisme.
Elle permet de réduire les obligations prévues par le PLU s’agissant de la réalisation d’aires de stationnement pour les véhicules motorisés à raison d’une seule aire de stationnement pour véhicule motorisé, à l’occasion d’un permis de construire.
En contrepartie, le projet doit prévoir la création d’infrastructures ou de l’aménagement d’espaces permettant le stationnement sécurisé d’au moins six vélos par aire de stationnement.
Pour décider d’accorder ou non la dérogation, l’administration doit tenir « compte de la nature du projet et de la zone d’implantation ».
Conseil : si les conditions permettant de bénéficier de cette dérogation sont cette fois assez simples, le sujet du stationnement est complexe pour beaucoup de communes. Là encore, s’il est envisagé d’en demander le bénéfice, nous recommandons donc d’en discuter le plus tôt possible avec l’administration.
Cette dérogation est prévue par l’article L.152-6-2 du code de l’urbanisme.
Elle permet de déroger aux règles relatives au gabarit, dans la limite d’une majoration de 30% de ces règles, et aux obligations en matière de stationnement, pour les projets de construction ou de travaux réalisés sur une friche lorsque le projet permet son réemploi.
Conseil : identifier en amont que le terrain constitue bien une friche au sens du code de l’urbanisme et que le projet permet son réemploi. Il ne suffit donc pas que le projet se trouve sur une friche pour bénéficier de cette dérogation.
Plusieurs dérogations sont prévues par l’article L.152-6-4 du code de l’urbanisme au bénéfice des constructions contribuant au développement ou à la revitalisation du territoire et facilitant le renouvellement urbain et la maîtrise de l’étalement urbain.
Le projet doit être situé dans dans le périmètre d’une grande opération d’urbanisme (GOU) ou dans un secteur d’intervention d’une opération de revitalisation de territoire (ORT).
L’administration peut ainsi déroger aux règles suivantes à l’occasion d’une demande de permis de construire située dans une zone urbaine :
Pour cela, l’administration dispose d’un pouvoir d’appréciation important. Elle doit en effet tenir compte « de la nature du projet, de la zone d’implantation, de son intégration harmonieuse dans le tissu urbain existant, de la contribution au développement, à la transformation ou à la revitalisation de la zone concernée et à la lutte contre la consommation des espaces naturels agricoles et forestiers “ et du “respect des objectifs de mixité sociale et fonctionnelle”.
Attention, cette dérogation n’est pas cumulable avec les dérogations mixité sociale et les dérogations sur les friches.
Conseil : comme pour les dérogations mixité sociale, les conditions permettant d’en sont nombreuses et donnent pour la plupart une marge importante d’appréciation à l’administration. S’il est envisagé d’en demander le bénéfice, nous recommandons d’en discuter le plus tôt possible avec l’administration.