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Prescription en urbanisme : point sur les délais en présence de travaux irréguliers

28
/
08
/
2025
par
Axel Bertrand
Chapitres

La réalisation de travaux irréguliers peut donner lieu à des sanctions pénales et à des mesures administratives. L’une d’elles est la mise en demeure de régulariser sur le fondement de l’article L.481-1 du code de l’urbanisme. Le Conseil d’Etat a récemment précisé qu’une telle mise en demeure est soumise au délai de prescription de l’action publique. A savoir un délai de 6 ans à compter, en principe, de l’achèvement de travaux (CE, 24 juillet 2025, n°503768, Lebon).

L’occasion de faire un point sur les différentes sanctions et mesures susceptibles d’être prononcées ainsi que sur les délais de prescriptions applicables en présence de travaux irréguliers.

La prescription pénale pour les infractions pénales d’urbanisme

La réalisation de travaux soumis à autorisation d’urbanisme sans avoir obtenu l’autorisation requise est constitutive d’une infraction pénale d’urbanisme. Il en va de même de la réalisation de travaux non conformes à l’autorisation obtenue. Par exemple des travaux non conformes à un permis de construire (articles L.480-1 et L.480-4 du code de l’urbanisme).

En présence d’une infraction pénale d’urbanisme, l’autorité compétente pour délivrer les autorisations d’urbanisme, le maire en principe, se trouve dans l’obligation de dresser un procès-verbal de constat d’infraction ainsi que d’en transmettre copie au ministère public sans délai (article L.480-1 du code de l’urbanisme).

Ces infractions sont punies d’une amende comprise entre 1 200 euros et un montant qui ne peut excéder une somme égale à 6 000 euros par m2 de surface de plancher (article L.480-4 du code de l’urbanisme).

En présence de travaux non liés à de la surface de plancher, l’amende ne peut excéder un montant de 300 000 euros. En cas de récidive, une peine de prison de six mois peut de plus être prononcée.

Le tribunal peut également ordonner la mise en conformité, voire la démolition de la construction réalisée, le cas échéant sous astreinte d’un maximum de 500 euros par jour de retard et sous exécution provisoire (articles L.480-5 et L.480-7 du code de l’urbanisme).

Le délai de prescription de ces infractions est de 6 ans à compter, en principe, de l’achèvement des travaux.

La commune ou l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d'urbanisme peut également saisir le tribunal judiciaire en vue de faire ordonner la démolition ou la mise en conformité (article L.480-14 du code de l’urbanisme). L'action civile se prescrit en pareil cas par dix ans à compter de l'achèvement des travaux.

La prescription administrative en cas de travaux irréguliers

La prescription administrative de 10 ans

La réalisation de travaux irréguliers impacte également l’obtention de futures autorisations d’urbanisme sur la construction en cause.

La condition préalable à l’obtention d’une future autorisation d’urbanisme est que la construction existante ait été autorisée et les travaux réalisés en conformité.

En présence de travaux irréguliers, le propriétaire qui souhaite obtenir une autorisation d’urbanisme doit ainsi en principe présenter une demande portant sur l’ensemble. Elle doit autrement dit régulariser les irrégularités. Sans quoi l’administration est tenue de rejeter la demande d’autorisation (CE, 9 juillet 1986, Thalamy, n°51172).

Cette imprescriptibilité administrative perpétuelle avait toutefois pour effet de rendre impossible la délivrance d’une nouvelle autorisation si les travaux non-conformes ou non autorisés n’étaient pas conformes aux règles d’urbanisme au jour des nouveaux travaux.

L’article 9 de la loi n°2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement (dite loi ENL) a donc introduit une prescription administrative à l’article L.111-12 de l’ancien code de l’urbanisme.

Ces dispositions ont été re codifiées à l’actuel article L.421-9 du code de l’urbanisme.

Lorsqu'une construction est achevée depuis plus de dix ans, le refus de permis de construire ou la décision d'opposition à déclaration préalable ne peut donc être fondé sur l'irrégularité de la construction initiale au regard du droit de l'urbanisme (article L.421-9 du code de l’urbanisme).

Il existe toutefois des exceptions à ce principe :  

  • Lorsque la construction est de nature, par sa situation, à exposer ses usagers ou des tiers à un risque de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente ;
  • Lorsqu'une action en démolition a été engagée dans certaines conditions ;
  • Lorsque la construction est située dans un parc national créé ou dans un site classé ;
  • Lorsque la construction est située sur le domaine public ;
  • Lorsque la construction a été réalisée sans qu'aucun permis de construire n'ait été obtenu alors que celui-ci était requis ;
  • Dans certaines zones de risque des plans de prévention des risques naturels prévisibles ;
  • Lorsque la construction a été réalisée sans consignation de la somme prescrite par l'autorisation d'urbanisme.
  • Une prescription administrative de 10 ans s’applique donc aux travaux irréguliers, sauf exceptions

Une prescription de 6 ans pour les mises en demeure de régulariser

L’article 48 de la loi n°2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique a complété cet arsenal par la possibilité d’adopter des mises en demeure de régulariser.

En présence d’une infraction pénale d’urbanisme, l’autorité compétente pour délivrer les autorisations d'urbanisme peut ainsi, indépendamment des poursuites pénales, prononcer une mise en demeure :

  • soit de procéder aux opérations nécessaires à la mise en conformité des travaux réalisés ;
  • soit de déposer une demande d’autorisation d’urbanisme de régularisation (article L.481-1 du code de l’urbanisme).

La mise en demeure ne peut être prononcée que lorsqu’un procès-verbal a été dressé et après avoir respecté une procédure contradictoire.

Le délai imparti par la mise en demeure étant fonction de la nature de l'infraction constatée et des moyens d'y remédier. Il peut le cas échéant être prolongé pour une durée qui ne peut excéder un an en cas de difficulté d’exécution.

La mise en demeure peut de plus être assortie d'une astreinte d'un montant maximal de 500 € par jour de retard. Le montant total des sommes résultant de l'astreinte ne pouvant excéder 25 000 €.

Cette astreinte peut être prononcée ab initio ou après l'expiration du délai imparti, le cas échéant prolongé s'il n'y a pas été satisfait, ce après respect d’une procédure contradictoire.

Aucun délai de prescription n’est prévu par l’article L.481-1 du code de l’urbanisme.

Le Conseil d’Etat a été saisi d’une demande d’avis sur une question de droit à ce sujet.

Il lui était en substance demandé :

  • Si une prescription s’oppose à ce pouvoir de mise en demeure et, si oui, à quelles conditions (durée et point de départ) ?
  • Comment s'articule cette prescription de 10 ans avec la prescription administrative prévue à l’article L. 421-9 du code de l’urbanisme ?

Le Conseil d’Etat indique d’abord que le pouvoir de mise en demeure prévu par l’article L.481-1 du code de l’urbanisme est soumis au délai de prescription de l’action publique (CE, 24 juillet 2025, n°503768, Lebon).

S’agissant de délits, il s’agit d’un délai de prescription de 6 ans. Ce délai court à compter du jour où l’infraction a été commise, c’est-à-dire, en principe, à compter de l’achèvement des travaux.

Le Conseil d’Etat précise ensuite que si des travaux ont été successivement réalisés de façon irrégulière, seuls les travaux à l’égard desquels l’action publique n’est pas prescrite peuvent donner lieu à la mise en demeure prévue par l’article L.481-1 du code de l’urbanisme.

En outre, s’agissant de l’articulation avec la prescription administrative de 10 ans, le Conseil d’Etat indique qu’il convient d’appliquer les conditions prévues par l’article L.421-9 du code de l’urbanisme.

La demande de régularisation doit ainsi porter sur l’ensemble de la construction dans les conditions prévues par cet article. Si des travaux irréguliers ne peuvent être ainsi régularisés, les opérations nécessaires à la mise en conformité ne peuvent ainsi porter que sur ces dernières.

Conclusion

En présence de travaux irréguliers, il convient de bien mesurer le niveau de risque.

Ce dernier résulte tant des mesures et sanctions susceptibles d’être prononcées sur le plan administratif et pénal - voire civil - que des délais de prescription.

Ces derniers étant à distinguer en fonction du type de mesure ou de sanction.

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